David Ricardo (1772-1823) va renforcer l'analyse d'Adam Smith en montrant que même lorsqu'un pays est plus efficace que les autres dans plusieurs domaines, il a néanmoins intérêt à se spécialiser et à commercer avec les autres pays. En effet, un pays efficace dans plusieurs productions aura intérêt à concentrer ses facteurs de production (capital et travail) dans l'activité pour laquelle il est le plus efficace.
Ricardo va démontrer que les pays ont intérêt à se spécialiser dans le produit pour lequel il dispose d'un avantage comparatif ou relatif, c'est à dire l'avantage spécifique dont dispose un pays par rapport à un autre, la spécialisation qui lui apporte la plus grande supériorité ou la moins grande infériorité. Le pays le plus performant doit se spécialiser dans le produit pour lequel il est comparativement à l’autre le meilleur, c’est-à-dire le produit pour lequel son avantage comparatif ou relatif est le plus élevé et le pays le moins performant doit se spécialiser dans le produit pour lequel son désavantage comparatif est le plus faible. L’avantage comparatif correspond donc au rapport entre les productivités respectives de chaque pays pour un bien ou le rapport entre leurs couts unitaires pour ce bien.
Remarque : Avantage comparatif = Productivité du pays A/Productivité du pays B
Dans le modèle simplifié proposé par Ricardo, qui met en relation la Grande Bretagne et le Portugal, produisant tous deux du vin et du tissu, la Grande Bretagne ne dispose d’aucun avantage absolu puisqu’elle est la moins efficace dans la production des deux biens. Les couts de production (en heures de travail) sont les suivants :
Portugal | Grande-Bretagne | |
Coût d'un tonneau de vin en heures de travail | 40h | 200h |
Coût d'une mesure de tissu en heures de travail | 80h | 100h |
Avantage comparatif dans le vin du Portugal | 200/40 = 5 | 200/40 = 5 |
Avantage comparatif dans le tissu du Portugal | 100/80 = 1,25 | 100/80 = 1,25 |
Coût total en autarcie | 120h | 300h |
Coût total après spécialisation | 80h | 200h |
Gain horaire procuré par la spécialisation | 40h | 100h |
Quantité produite après la spécialisation | 3 tonneaux de vin | 3 mesures de draps |
Dans le vin, le Portugal est 5 fois plus productif que la Grande-Bretagne ce qui signifie que le cout de fabrication d'un tonneau au Portugal représente 20 % de celui de la Grande-Bretagne.
Dans le tissu, le Portugal est 1,25 fois plus productif que la Grande-Bretagne ce qui signifie que le cout de fabrication d'une mesure de tissu au Portugal représente 80 % celui de la Grande Bretagne.
Le Portugal a donc le plus grand avantage dans le vin. Il va abandonner la production de tissu et se consacrer uniquement au vin. La Grande-Bretagne a le moindre désavantage dans le tissu. Elle va abandonner la production de vin et se consacrer à la fabrication de tissu. Après spécialisation, le Portugal « récupère » 40 heures qu'il va affecter à la production de vin, ce qui lui permet d'en produire 2 tonneaux de plus. La Grande-Bretagne, quant à elle, peut réaffecter 100 heures dans le tissu, ce qui lui permet d'en produire 2 mesures de plus. La spécialisation a donc augmenté la production mondiale de 2 tonneaux de vin et de 2 unités de tissus supplémentaires.
Chaque pays va pouvoir échanger ses excédents et gagner à l'échange à la condition que les prix relatifs du marché mondial ou termes de l'échange soient compris dans la fourchette des prix relatifs de l'échange interne.
Remarque : Prix relatif = Prix d’un bien B/Prix d’un bien A
Cette démonstration suppose un certain nombre d’hypothèses :
- hypothèse n°1 - le marché mondial est en concurrence pure mais pas parfaite : le prix relatif d’un bien sur le marché mondial est fixé selon les lois de l’offre et de la demande en concurrence ;
- hypothèse n°2 - l’immobilité internationale des facteurs : le capital et le travail sont immobiles à l'extérieur, c'est à dire qu'il n'y a pas de migrations internationales et d'investissement à l'étranger, sinon il y aurait échange de travail et de capital à la place de l'échange des biens. En revanche, les facteurs sont mobiles à l’intérieur du pays ;
- hypothèse n°3 - les avantages comparatifs sont durables : en effet, les rendements sont constants ce qui signifie qu’un pays avantagé le restera et qu’il n’y a pas d’économies d’échelle ;
- hypothèse n°4 - le commerce mondial est un commerce interbranche : l’échange s’effectue entre deux pays de spécialisation et éventuellement de développement différents (Angleterre et Portugal). Les produits échangés sont de natures différentes (drap contre vin). Ce commerce mondial correspond à la DIT traditionnelle (le Sud exportent des produits primaires tandis que le Nord exportent des produits manufacturés) ;
- hypothèse n°5 - le libre échange : les marchés nationaux ne doivent pas être protégés par des barrières tarifaires ou non tarifaires.
Ainsi, les pays ont intérêt à se spécialiser dans la production où ils possèdent un avantage absolu ou relatif afin de participer au commerce mondial et dégager des gains à l’échange.