Comment le changement climatique affecté l'économie ?

Le dérèglement climatique a des conséquences directes sur notre économie. Le phénomène devrait s'amplifier: le rapport du Giec sur le climat, publié ce lundi, est alarmant.

Le rapport des experts climat de l'ONU, le Giec, a été publié ce lundi. Une synthèse des connaissances climatiques très attendue, à un moment où les catastrophes naturelles se multiplient. Incendies, inondations, tempêtes sont des conséquences directes des activités humaines selon de nombreux chercheurs.

L'économie est un pan souvent oubliée dans la course contre la montre pour freiner le réchauffement climatique. Pourtant, le dérèglement du climat influe déjà sur certains secteurs économiques. Un phénomène qui devrait s'accentuer.

"De nombreux secteurs sont sensibles aux conditions météorologiques. C'est notamment le cas du bâtiment car en cas de grosses chaleurs, les chantiers sont arrêtés", nous explique Clément Albergel, chercheur au bureau climatique de l'agence spatiale européenne.

Autre exemple, celui des transports aériens et ferroviaires. "La canicule gêne le décollage des avions et affecte le matériel ferroviaire comme les rails", évoque aussi le chercheur.

Or, dans les cinq scénarios élaborés par le Giec, du plus optimiste au plus pessimiste, la température mondiale devrait atteindre +1,5°C ou +1,6°C par rapport à l'ère pré-industrielle autour de 2030. Soit dix ans plus tôt que la précédente estimation du Giec il y a trois ans.

Notre manière de consommer évolue aussi en fonction du climat. La consommation de boissons gazeuses ou de bières augmente pendant les canicules. Et les consommateurs ne font plus les mêmes choses: au lieu de se rendre dans les magasins de centre-ville, les centres commerciaux climatisés sont préférés.

Le prix des assurances pourrait monter en flèche

Le secteur des assurances est de plus en plus solicité. Gel, inondations ou encore sécheresse étaient des phénomènes exceptionnels il y a quelques années. Ils sont désormais récurrents. Depuis cinq ans, le coût des sinistres lié aux événements climatiques dépasse chaque année les 3 milliards d'euros.

"La conséquence pour les assurés, c'est de voir leur facture d'assurance habitation augmenter d'année en année et de doubler, voire tripler, d'ici 10 ou 15 ans, parce que les catastrophes naturelles vont toucher de plus en plus de monde", détaille sur BFM Business Fabien Soccio, porte-parole de Meilleureassurance.

L'assurance habitation, qui coûte environ 300 euros par an, pourrait atteindre les 1000 euros. Pour l'éviter, il va falloir faire "plus de prévention". "Il ne faut pas bâtir en zone inondable, éviter d'avoir des problématiques liées à l'usage des sols alors que l'on est dans des zones de sécheresse", avance Fabien Soccio. Si rien n'est fait, certaines zones en France pourraient même ne plus être assurées.

Cette année, les assureurs sont aussi venus en aide aux agriculteurs, dont le métier est climatico-dépendant. Le gel survenu au printemps a condamné de nombreuses cultures. Les Français ont trouvé peu de fruits sur les étals cet été et la production de vin 2021 a été lourdement impactée.

"Ce changement climatique que tout le monde constate, les agriculteurs s’y sont adaptés. Mais il y a des choses qu’on ne peut pas changer: là où il y a de l’herbe, on ne peut pas mettre autre chose. Il faut avoir des outils de prévention. Quand on demande de l’irrigation pour lutter contre la sécheresse, c’est nécessaire parce que la sécheresse fait des dégâts”, expliquait lundi sur France Inter Christiane Lambert, présidente de la Fédération Nationale des Syndicats Agricoles (FNSEA).

Depuis la parution du premier rapport du GIEC sur le changement climatique en 1990, les publications scientifiques sur ses conséquences potentiellement dévastatrices se sont multipliées : températures insoutenables dans les régions tropicales, sécheresses, possible déstabilisation des calottes polaires et hausse majeure du niveau marin…

Pourtant, face à ces perspectives alarmantes, la plupart des estimations des dommages économiques associés suggèrent que la perte de PIB mondial serait limitée à quelques pour cent. Nettement moins que les 4,5-6 % de pertes liées à l’épidémie de Covid-19. Autrement dit, tout cela ne serait pas bien grave.

Ces deux visions semblent difficilement conciliables. Les méthodes employées pour évaluer les potentiels dommages climatiques ont déjà été sévèrement critiquées pour leur manque de fondements scientifiques, mais la croyance qu’un réchauffement global de 3 ou 4 °C n’est qu’un problème mineur reste courante chez bien des économistes.

Des projections fondées sur une approche statistique

Parmi les méthodes les plus fréquentes, l’approche statistique a le vent en poupe. Il s’agit généralement d’établir empiriquement un lien entre le PIB et une ou plusieurs variables climatiques (température, précipitation…) utilisées comme indicateurs de l’ensemble des impacts climatiques. Ce lien est établi à partir des données disponibles sur les dernières décennies, puis employé pour projeter le PIB futur avec ou sans changement climatique.

Ainsi, une étude parue en 2015 a proposé une relation entre température moyenne annuelle et croissance du PIB à l’échelle des pays. Dans cette hypothèse, un réchauffement global de 4 °C en 2100 conduirait à une réduction du PIB mondial d’au moins 23 %.

Ce chiffre peut sembler élevé, mais il s’agit d’une perte de PIB potentiel, c’est-à-dire par rapport à ce qu’il aurait été à cette même date sans changement climatique. Le scénario socioéconomique utilisé comme référence postulant la poursuite d’une forte croissance au XXIe siècle, le monde n’en serait pas moins plus « riche » qu’aujourd’hui.

Une autre étude, parue en 2018, estime quant à elle que le climat joue sur le niveau de PIB et non pas sur sa croissance. Dans ce cas, les conditions météorologiques annuelles peuvent exercer un choc sur une économie, mais n’affectent pas la trajectoire projetée et la perte de PIB mondial en 2100 serait limitée à seulement 1-2 %.

Démonstration par l’absurde

De notre point de vue, ces projections sous-estiment l’une comme l’autre les dommages potentiels d’un réchauffement global de cette ampleur.

Or, si l’on peut éprouver des difficultés à se figurer les nouvelles conditions climatiques et environnementales pour un réchauffement de 4 °C, faute de situation analogue dans un passé récent, nous pouvons avoir une bonne idée de ce à quoi elles ressembleraient pour un refroidissement de 4 °C : car cela correspondrait à un retour à la dernière période glaciaire, pour laquelle nous disposons non seulement de simulations climatiques, mais également de nombreuses données de terrain.

Aussi, afin de souligner encore le caractère irréaliste des projections de dommages obtenues par approche statistique, nous avons adopté une approche originale de démonstration par l’absurde et appliqué les méthodologies des deux études citées précédemment à un hypothétique refroidissement de 4 °C en 2100.

Nous avons ensuite confronté les projections de PIB obtenues à ce que la littérature scientifique nous dit du visage de notre planète au maximum de la dernière ère glaciaire, il y a 20 000 ans. Nous n’avons pas considéré les calottes glaciaires de plusieurs kilomètres, qui recouvraient alors le Canada et les pays scandinaves, car leur croissance requiert des millénaires et non pas quelques décennies.

En utilisant l’hypothèse que la température affecte le niveau de PIB, nous avons obtenu une perte de PIB potentiel mondial de moins de 2 % en 2100. Les pays essuyant le maximum de pertes sont ceux du nord, avec par exemple – 8 % pour le Canada ou la Norvège, alors que ceux du sud connaissent une augmentation de PIB de 1-2 %.

En nous fondant sur une relation entre température et croissance annuelle du PIB, nous avons obtenu un effondrement complet du PIB des pays du nord, mais une forte croissance du PIB dans les régions tropicales. Au niveau global, les gains au sud font plus que compenser les pertes au nord et le PIB mondial progresse de 36 % par rapport au scénario de référence.

Dans le film Le Jour d'après, sorti en 2004, une série de catastrophes climatiques se produisent. (Films Exclu, 2018)

Des résultats irréalistes

Contrairement à ce que suggèrent ces chiffres, les conditions dans un tel scénario seraient dramatiques pour une bonne partie de l’humanité. Citons quelques éléments majeurs :

  • Le Canada et les pays scandinaves seraient enfouis sous une couche de neige permanente et croissante de plusieurs mètres et verraient leur température moyenne annuelle diminuée d’environ 20 °C ; les régions alpines, les pays baltes, une partie des îles britanniques, de la Pologne et de l’Allemagne seraient également enterrés sous la neige. Il est donc assez peu vraisemblable que les populations et les activités humaines pourraient s’y maintenir à leurs niveaux actuels.

  • Les températures hivernales en Europe de l’Ouest chuteraient de 10 à 20 °C, le sol gelé en permanence jusqu’à la latitude de Bordeaux, la végétation naturelle actuelle remplacée par de la steppe ou de la toundra et de gigantesques tempêtes de sable surviendraient.

Maintenir une agriculture serait extrêmement difficile, sinon impossible, les infrastructures endommagées par le froid, les besoins énergétiques pour le chauffage exploseraient… En bref, là encore, difficile d’imaginer que la population européenne puisse se maintenir à son niveau actuel.

  • En Chine, le sol gelé s’étendrait jusqu’à Pékin, le froid empêcherait la céréaliculture dans les plaines du nord, le débit du Yangtze serait diminué de moitié avec un impact majeur sur la production hydroélectrique.

  • Dans les tropiques, la diminution des températures serait modérée (2-3 °C), ce qui pourrait favoriser les pays concernés, mais ce refroidissement s’accompagnerait de perturbations sérieuses du cycle hydrologique, avec une forte diminution de la mousson et une expansion des déserts sur plusieurs centaines de kilomètres.

Les résultats obtenus en liant température et niveau de PIB ne sont donc absolument pas réalistes et disqualifient clairement cette approche. Pour le Canada par exemple, comment imaginer que les conséquences du passage à un climat polaire permanent en quelques décennies à peine n’affecteraient pas sa croissance et se limiteraient à une perte de 8 % de PIB potentiels ?

Ceux obtenus avec un impact sur le taux de croissance semblent plus plausibles, du moins pour les pays du nord. Mais les projections d’augmentation du PIB des pays en zone tropicale, outre qu’elles ne prennent pas en compte l’impact sur l’économie mondiale d’un effondrement complet de la plupart des pays de l’OCDE, ne sont pas crédibles : nous avons par exemple conclu à une augmentation de plus de 300 % du PIB des pays sahéliens, difficilement conciliable avec une expansion du Sahara de plus de 400 km vers le sud.

L’utilisation de ces approches statistiques aboutit donc à des projections de PIB absurdes dans le cadre d’un hypothétique retour en période glaciaire à la fin du siècle. Il n’y a aucune raison de supposer que ce type de méthodologie puisse nous fournir des projections plus fiables dans le cas d’un réchauffement global qui pourrait être de même amplitude que celui qui nous sépare de la dernière période glaciaire.

Pourquoi ces résultats absurdes ?

Les raisons potentielles de l’échec de ces approches, détaillées dans notre article, sont nombreuses. Citons-en quelques-unes, non exhaustives :

  • Les moyennes annuelles, à l’échelle d’un pays, des températures ou des précipitations sont probablement de mauvais indicateurs des phénomènes climatiques susceptibles d’occasionner des dommages, notamment les événements extrêmes. Il serait sans doute judicieux d’utiliser aussi les variations de températures et/ou précipitations.

  • Par construction, certains facteurs de risque climatiques majeurs ne sont pas pris en compte : changement de l’extension des glaciers et du pergélisol, modification du niveau marin et de la géochimie de l’océan ou bascule des écosystèmes, etc. Sans compter les bouleversements induits sur les relations socioéconomiques entre les États.

  • La façon de gérer les cas où la température d’un pays sort de son intervalle historique est problématique. Deux cas de figure sont possibles :

Premier cas de figure : la nouvelle température se trouve dans l’intervalle historique d’autres pays ; on utilise alors la relation température-PIB établie pour ces autres pays. La validité de cette stratégie est indémontrable et reste assez douteuse, ne serait-ce qu’en raison de la difficulté technique et du coût pour adapter des infrastructures initialement conçues pour durer des décennies à un climat radicalement différent. Par ailleurs, les écosystèmes ont leur vitesse d’évolution propre et peuvent mettre des siècles à atteindre un équilibre avec un nouveau climat.

Second cas de figure : La nouvelle température sort des conditions jamais observées dans aucun pays. Dans ce cas, on plafonne cette température à la valeur maximale (ou minimale) de l’échantillon de calibration, ce qui conduit potentiellement à une importante sous-estimation des dommages.

Ainsi, en admettant que des relations empiriques PIB-variable(s) climatique(s) établies sur quelques décennies soient fondées, ce qui reste très discutable, les conclusions que nous pouvons en tirer apparaissent très limitées : sur les dernières décennies, avec un climat encore assez stable, l’effet de la variabilité météorologique interannuelle sur le PIB semble relativement faible.

En sachant que seuls les impacts pour lesquels la température moyenne annuelle est effectivement un indicateur pertinent sont pris en compte. Aussi, nous estimons que ce type d’approche statistique ne peut permettre d’évaluer de façon réaliste les conséquences les plus graves d’un changement climatique de grande ampleur et ne devrait pas être utilisé pour cela.

Comment le changement climatique affecté l economie ?

Selon différentes études, les changements climatiques mèneront à : un ralentissement de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté, une érosion de la sécurité alimentaire.

Pourquoi le changement climatique est un problème économique ?

Le changement climatique, au-delà de modifier le climat, va induire des impacts sur la biodiversité, les écosystèmes et par voie de conséquence sur l'homme et ses activités : modification de rendements agricoles, augmentation du nombre de réfugiés climatiques, de catastrophes naturelles, adaptation économique...

Quel est le lien entre la croissance économique et le réchauffement climatique ?

Or la croissance économique, dans sa forme actuelle, nuit à l'environnement : elle épuise le capital naturel en détruisant des ressources non renouvelables comme les matières premières, les sources d'énergie. Elle dégrade les écosystèmes, appauvrit la biodiversité et perturbe le climat.

Quelles sont les impacts du changement climatique dans les pays en développement ?

Les changements climatiques auront un impact sur la qualité de l'eau dans les régions qui connaissent déjà un déficit hydrique. Dans les pays en développement, l'agriculture absorbe près de 95 % d'eau.