Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

Introduction :

Au cours de son histoire, la Terre a connu de nombreux changements climatiques : l’ère quaternaire par exemple a vu se succéder des périodes glaciaires, séparées par des périodes interglaciaires. De récentes études montrent que le Crétacé, souvent considéré comme une période chaude, aurait été marqué par des périodes froides avec un développement de calottes glaciaires importantes dans les hautes latitudes.
Le climat se modifie à l’échelle des temps géologiques. Afin d’expliquer ces variations, opérons un voyage dans le temps pour tenter de comprendre le passé climatique de la Terre.

Nous étudierons d’abord la succession de grandes ères climatiques avant de nous pencher plus précisément sur le Quaternaire. Puis nous exploiterons les moyens utilisés par les scientifiques pour obtenir des informations sur ces différentes périodes afin d’en reconstruire les climats et appréhender l'avenir.

Grandes ères climatiques de la Terre

Ères glaciaires et interglaciaires

À l’échelle des temps géologiques, on peut distinguer différentes ères : après le Précambrien, on trouve le Paléozoïque, qui a duré environ 300 millions300\ \text{millions} d’années ; puis le Mésozoïque (185 millions185\ \text{millions} d’années) ; et enfin le Cénozoïque, d’une durée de 65 millions65\ \text{millions} d’années, et qui englobe le Quaternaire.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

À retenir

Le climat varie entre ères froides, dites « glaciaires » et ères chaudes sans calotte glaciaire.

Astuce

Au cours des ères glaciaires, se développent d’importantes calottes glaciaires à la fois dans l’hémisphère nord et sud.

  • Nous sommes donc actuellement en pleine ère glaciaire.

On connaît aussi d'autres ères glaciaires, que l’on juge plus importantes ; notamment celle associée à la théorie de la snow-ball Earth (ou « Terre boule de neige »). Cette théorie suppose qu’au Varangien (−610-610 à −580 millions-580\ \text{millions} d’années) la Terre était presque entièrement gelée.

Sur l’iconographie ci-dessus, on peut noter cette succession de cinq ères glaciaires :

  • la glaciation précambienne (que l’on scinde parfois en deux glaciations distinctes) ;

  • la glaciation ordovicienne ;

  • la glaciation de la fin du Carbonifère ;

  • la glaciation de la fin du Jurassique, que l’on soupçonne à l’origine de l’extinction des dinosaures ;

  • la glaciation actuelle commencée sur le continent Antarctique.

Exemple

La période de réchauffement la plus étudiée se produit au cours du Cénozoïque, à la transition entre le Paléocène et l’Éocène, qui se marque par une forte augmentation de températures appelée Paléocène Éocène Thermal Maximum (PETM). Ce réchauffement aurait été provoqué par l'émission de gaz à effet de serre provenant de sédiments enfouis : les températures auraient alors augmenté de 4°C4\,\degree\text{C} à 7°C7\,\degree\text{C} et il a fallu ensuite 200 000200\ 000 ans avant que la planète ne résorbe l’excès de carbone et finisse par se refroidir.

Au cours du Paléocène et de l’Éocène notre planète a connu de nombreuses périodes de réchauffement planétaire. Ces épisodes hyperthermiques, caractérisés par une augmentation de température de 3°C3\,\degree\text{C}, se déroulaient tous les 100 000100\ 000 à 400  000400\ 000 ans. Grâce aux sédiments prélevés le long de la côte de l'Amérique du Sud, on pense que ces épisodes furent provoqués par les changements d'inclinaison de l'axe de la Terre.

Rappel

L'axe terrestre est légèrement incliné : il oscille entre 22,1°22,1\degree et 24,5°24,5\degree pendant des cycles qui peuvent durer 41 00041\ 000 ans.

Depuis près de 2 millions2\ \text{millions} d’années, nous vivons dans l’ère quaternaire, caractérisée par une alternance de périodes froides (glaciaires) et plus chaudes (interglaciaires).

Attention

Attention à ne pas confondre « ère glaciaire » et « période glaciaire ». Actuellement nous sommes en pleine ère glaciaire (les pôles présentent une calotte glaciaire) en période interglaciaire.

Variations climatiques du Quaternaire

Comme nous l’avons vu, nous sommes au cœur d’une ère glaciaire. Toutefois, le thermomètre peut osciller entre très chaud et très froid et alterner des périodes glaciaires et interglaciaires. Voici une vue d’ensemble de ces phénomènes au cours du Quaternaire.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

Au cours de la glaciation würmienne, on suppose l’existence d’un permafrost permanent sur une bonne partie de la moitié nord du globe (jusqu’à la latitude des Charentes maritimes).

Astuce

En 1991 des plongeurs découvrent une grotte paléolithique dans la calanque de la Triperie (près de Marseille). On y trouve notamment représentés trois pingouins, témoins de températures plutôt basses à cette époque !

Suivra une déglaciation rapide (−15 000-15\ 000 ans à −5 000-5\ 000 ans), le niveau des mers monte, et leur température s’élève de 9 °C9\,\degree\text{C} ; il y a une augmentation des températures moyennes c’est le début d’une période interglaciaire appelée « optimum climatique de l’Holocène ».

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

À retenir

Le Quaternaire est caractérisé par des cycles climatiques rapides et de grandes amplitudes liés aux paramètres de Milankovitch. Ces cycles sont associés à une variation du volume des glaces polaires et donc à une variation du niveau de la mer.

Pour reconstituer le climat du passé, il faut étudier les paramètres climatiques comme les températures, les mouvements des fluides… à partir de plusieurs indices, notamment les fossiles, afin de savoir comment la chaleur était transportée.

  • On appelle la science qui permet de reconstituer les conditions climatiques passées et leur évolution la paléoclimatologie.

Cette discipline scientifique a été bouleversée dans les années 1950 par l’introduction de nouvelles méthodes géochimiques comme l’utilisation de dosage des isotopes de l’oxygène, le rapport 18O/16O^{18}\text{O}/^{16}\text{O} dans les carbonates et les glaces polaires (nous le verrons dans la dernière partie de notre analyse).

Paléoclimatologie

Qu’est-ce que la paléoclimatologie ?

Afin de mieux comprendre nos changements climatiques actuels, il est important de connaître les différents climats terrestres au cours des temps géologiques ; c’est pourquoi, les indicateurs paléoclimatiques sont précieux.

Définition

Indicateurs paléoclimatiques :

Les indicateurs paléoclimatiques regroupent l’ensemble des données sédimentologiques et paléontologiques nécessaires à l’étude des climats anciens.

Plusieurs méthodes d’analyse de ces indicateurs permettent de reconstituer les paléoenvironnements des différentes périodes géologiques.
Grâce aux techniques de forage, les glaciologues peuvent prélever, sur plusieurs milliers de mètres d’épaisseur de glace, de longs cylindres qu'on appelle carottes. Les études de ces carottes de glace fournissent une mine d'informations directement liées au passé et permettent de modéliser l'évolution future de notre climat.

Définition

Carottes glaciaires :

Une carotte glaciaire est un échantillon prélevé par forage (ou carottage) au sein de calottes glaciaires ou de tout autre glacier.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?
Carotte glaciaire à la sortie d’un forage

Exemple

Les résultats des collectes d’échantillons extraits des carottes glaciaires issues de forages sur le continent antarctique révèlent l’évolution du climat (température et composition atmosphérique) des 800 000800\ 000 dernières années.

Au cours de leur formation, les glaces emprisonnent des bulles d’air, des sédiments, des roches et certaines substances radioactives. Toutes ces particules, conservées intactes dans la glace, reflètent les caractéristiques atmosphériques et environnementales de la période à laquelle elles ont été piégées.

  • La glace des pôles est une archive des climats passés de notre planète.

Astuce

Les couches superficielles des calottes polaires correspondent aux couches les plus récentes et les couches profondes aux plus anciennes. Plus la glace est profonde, plus elle permet de remonter dans le passé, c’est le principe de superposition.

À retenir

C’est en étudiant les dépôts continentaux, les sédiments marins, et les glaces polaires, que les géologues ont pu reconstituer la succession de périodes glaciaires et interglaciaires au cours des temps géologiques.

Voyons plus en détail…

Approches pluridisciplinaires de la paléoclimatologie

  • Approche floristique

Les fossiles trouvés dans les sédiments contiennent des pollens. Les pollens présentent une très grande diversité morphologique. Leur détermination est fondée sur la taille et la forme des grains, sur leur enveloppe ainsi que sur la présence, le nombre et la disposition de pores ou de sillons à leur surface.

Exemple

Les pollens d’arbre indiquent des périodes chaudes, tandis que les pollens d’herbacés sont des marqueurs de périodes plus froides.

Définition

Palynologie :

La palynologie appliquée à l’archéologie (paléopalynologie) est la science qui étudie les pollens et les spores fossilisés piégés dans les couches successives de sédiments, afin de retracer les variations de l’environnement végétal sur de très longues périodes de temps.

Le·La paléopalynologue réalise un prélèvement par carottage, en milieu humide, ou sur coupe, sur la paroi d’une tranchée archéologique.
Pour chaque échantillon, il·elle identifie et dénombre au microscope un minimum de trois cents à cinq cents pollens. Les données recueillies permettent de tracer un diagramme pollinique de la zone étudiée.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

À retenir

Ainsi, il est possible de reconstituer le spectre pollinique d’un biome par le dénombrement et l’identification des traces de pollen retrouvées dans une carotte. Cette caractérisation permet d’identifier une population végétale et donc son environnement climatique.

  • Approche faunistique

Comme pour l’étude des pollens, l’approche faunistique permet le suivi de la distribution spatiale des espèces (ici, animales) en milieux marins et continentaux. Cette approche, moins précise est généralement utilisée pour confirmer les analyses des données floristique et sédimentologique.

  • Approche sédimentologique

L’approche sédimentologique se propose de reconstruire les climats d’un lieu donné en étudiant les roches sédimentaires à proximité.
Certains minéraux, par exemple, ne se forment que dans des conditions de température bien particulières, permettant ainsi de reconstituer le climat en un lieu et une époque données.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?

Grâce aux moraines, on peut étudier l’avancée ou le recul des glaciers au cours du temps. Elles permettent d’évaluer la surface, le volume du glacier et le bilan de masse glaciaire. On peut ainsi relier ces fluctuations au climat.

Définition

Moraines :

Les moraines sont des amas de blocs et de débris rocheux entraînés par le mouvement de glissement d’un glacier qui apparaissent lorsque celui-ci se retire, en s’accumulant sur les bords, le centre ou l’extrémité inférieure de celui-ci.

Le prélèvement d’une carotte de glace va permettre de mettre en pratique ces différentes approches.

Reconstruire les climats passés grâce à l’étude des carottes glaciaires

Lorsqu’une carotte glaciaire est prélevée, plusieurs éléments sont analysés :

  • les stries annuelles qui permettent une datation assez fine des échantillons ;

  • les bulles d’air piégées par la glace qui révèlent la teneur en gaz à effet de serre (CO2\text{CO}2 et CH4\text{CH}4) de l’atmosphère au moment du dépôt ;

  • et les rapports isotopiques de l’oxygène et de l’hydrogène qui composent les molécules d’eau de la glace et qui varient en fonction de la température atmosphérique.

Comment reconstituer le climat du Crétacé ?
Sur cette carotte, l’alternance entre les couches sombres et claires correspond, respectivement, à la succession des étés et des hivers.

  • Analyse du taux de CO2\text{CO}_2

Les microbulles de gaz emprisonnées dans les carottes de glace sont fréquemment utilisées pour estimer les taux de CO2\text{CO}_2 de l’atmosphère du passé.

À retenir

On a pu établir un lien entre la quantité de CO2\text{CO}2 atmosphérique et la courbe historique des températures : plus le niveau de CO2\text{CO}2 atmosphérique est élevé, plus la période était chaude.

  • Composition isotopique des glaces

Actuellement, il nous est possible de reconstituer les paléotempératures en étudiant la composition isotopique des glaces.
La molécule d’eau est composée de deux atomes d’hydrogène et d’un atome d’oxygène qui est un mélange de trois isotopes 18O^{18}\text{O} (0,20%0,20\,\% ), 17O^{17}\text{O} (0,04%0,04\,\%) et 16O^{16}\text{O} (99,76%99,76\,\%). On les retrouve dans tous les composés oxygénés naturels (notamment l'eau).

Définition

Isotopes :

Les isotopes d’un élément sont des atomes de cet élément ayant le même nombre de protons mais un nombre différent de neutrons.

L'eau est constituée essentiellement à partir de l'isotope 1616 de l'oxygène qui est le plus répandu.

  • Le rapport H218O/H216O\text{H}2^{18}\text{O}/\text{H}2^{16}\text{O} dans l'eau est de l'ordre de 1/5001/500.

Un refroidissement a deux conséquences au niveau des rapports isotopiques :

  • la diminution du δ18O\delta^{18}\text{O} des glaces ;

  • l’augmentation du δ18O\delta^{18}\text{O} des sédiments.

Dans le cycle de l’eau, l’isotope 18O^{18}\text{O} se déplace plus difficilement car il est plus lourd que l’isotope 16O^{16}\text{O}. Il s’évapore moins facilement à l’équateur et chute avec les précipitations qui s’écoulent vers les pôles.

Astuce

C’est pourquoi les calottes polaires sont plus pauvres en isotope lourd que les océans surtout si le climat est froid.

Exemple

Lorsque l'eau de mer s'évapore, la molécule H216O\text{H}2^{16}\text{O} légère passe plus rapidement dans la phase vapeur que la molécule lourde H218O\text{H}2^{18}\text{O} ; or, la vapeur d'eau s'évapore essentiellement dans les régions tropicales les plus chaudes.

À retenir

On peut donc en déduire qu’une glace pauvre en 18O^{18}\text{O} provient d’une période de climat froid et inversement.

Conclusion :

Étudier les climats passés permet de mieux comprendre les évolutions possibles du climat actuel et d’anticiper les éventuelles variations. Pour cela, les climatologues doivent disposer de séries d'observations sur de longues périodes.
Aujourd’hui, ils tentent de mettre en évidence le rapport entre le réchauffement climatique et les émissions anthropiques de gaz à effet de serre. Ils étudient les variations passées du carbone qui ont notamment permis de confirmer le rapport existant entre la concentration du gaz carbonique dans l’atmosphère et le niveau global des températures. Ils étudient l’état des océans, leur évolution et les modifications affectant leur rôle dans le climat et le cycle du carbone.

Comment les géologues Ont

C'est en étudiant les dépôts continentaux, les sédiments marins, et les glaces polaires, que les géologues ont pu reconstituer la succession de périodes glaciaires et interglaciaires au cours des temps géologiques.

Comment reconstituer les variations climatiques ?

Pour reconstituer des climats locaux du passé de manière précises, les scientifiques s'appuient sur plusieurs indices : Le δ18O (delta O dix-huit) : cette mesure exprime le rapport entre la quantité d'oxygène 18 et la quantité d'oxygène 16 dans les glaces et les carbonates. On le mesure dans les calottes de glace.

Quels sont les indices que les scientifiques utilisent pour reconstituer les climats passés ?

Les paléoclimatologues disposent de nombreux indices pour étudier les variations climatiques : analyse isotopique de l'air emprisonné dans les carottes glaciaires, analyse isotopique des tests de foraminifères, études des sédiments des lacs et tourbières et des pollens qu'ils renferment.

Comment était le climat au Crétacé ?

D'après celles qui se sont formées au Crétacé, les géologues peuvent déduire que le Crétacé a été la période la plus chaude de l'Histoire de la Terre, la température moyenne à la surface du globe restant au-dessus de 20°C, contre 15°C environ aujourd'hui.