Quelles sont les conséquences de l'atmosphère ?

1. Introduction

1La pollution menace directement :

  • la santé de la population et, plus particulièrement, des individus les plus sensibles (enfants, personnes âgées, malades des voies respiratoires, ...)
  • la santé des animaux, surtout les herbivores qui sont directement menacés par les dépôts de polluants sur les herbages,
  • la santé des plantes qui sont un accumulateur efficace de polluants parce qu’elles offrent de grandes surfaces de piégeage. La pollution de l’air menace également
  • la qualité des matériaux qui se dégradent sous l’agressivité des polluants les plus divers ; l’estimation du coût de ces dégradations est impressionnante, encore qu’il soit difficile d’apprécier en termes d’argent l’altération, par exemple, de monuments historiques,
  • la qualité des sites par réduction de la pureté de l’air,
  • la stabilité de l’atmosphère, du climat de la terre et de la couche d’ozone stratosphérique.

2Il est impossible de décrire la somme des dommages potentiels et réels que nous fait encourir la pollution sous toutes ses formes. En particulier, les dommages potentiels exercés par les différentes pollutions sur la santé humaine dépassent manifestement le cadre de cet ouvrage. Nous n’aborderons donc que les thèmes qui alimentent l’actualité :

  • la maladie des forêts.
  • le « trou » d’ozone sur l’Antarctique.
  • le « smog » photochimique.
  • le forçage de l’effet de serre.

3Les problèmes liés à la radioactivité, objet de bien des soucis, seront traités dans le chapitre consacré à l’énergie nucléaire.

2. La maladie des forêts

4Il y a une vingtaine d’années, le thème du dépérissement des forêts faisait la une de l’actualité : en certaines régions d’Europe, la situation était effectivement catastrophique. Des remèdes substantiels ont été apportés par la réduction globale des émissions de gaz acides, dont le plus actif est sans doute SO2. Il n’en reste pas moins vrai que, dans bon nombre de forêts d’Europe, des arbres sont encore « malades » : leur couronne de feuillage (la canopée) s’éclaircit. Que se passe-t-il donc pour que de tels géants déclinent de cette manière ? On se souviendra également que les tempêtes, pourtant pas si exceptionnelles, du début de l’année 1990 ont, dans certaines régions d’Europe, couché sur le sol un nombre particulièrement élevé d’arbres que l’on croyait pourtant aguerris à ces humeurs du temps. Ces arbres étaient-ils alors affaiblis au point de céder devant une tempête qui, dit-on, se reproduit plusieurs fois par siècle ? Si la forêt est malade, c’est probablement parce que son mode de vie n’est pas satisfaisant : c’est toute son hygiène qui est à réviser. La pollution de l’air constitue certainement le facteur de base du mal, mais il n’est sûrement pas le seul à mettre en cause. En effet, si la pollution de l’air, omniprésente, était la seule explication, pourquoi certains arbres de certaines forêts seraient-ils atteints et pas d’autres ? Des arbres sains vivent et se portent bien dans des zones polluées alors que des forêts sont malades dans un environnement atmosphérique réputé sain. Une simple mesure de l’acidité des eaux de pluie montre bien que les forêts les plus malades ne sont pas nécessairement celles qui sont soumises aux précipitations les plus agressives. Voici quelques-unes des hypothèses qui pourraient très logiquement être invoquées dans le problème qui nous occupe : dans le désordre et sans mettre en exergue l’une plutôt que l’autre.

  • Les forêts sont le plus souvent des cultures artificielles : elles ne sont pas nécessairement implantées dans les régions et sur les sols qui conviennent le mieux aux essences qu’on y rencontre. En outre, les terres riches sont le plus souvent consacrées à l’agriculture, à l’élevage ; les terres marginales sont fréquemment abandonnées aux forêts.
  • Le sol des forêts s’appauvrit car, au contraire de ce qui se pratique en culture alimentaire, la fumure n’y est pas de mise. Les exportations de matière végétale ne sont pas compensées par l’apport d’engrais.
  • Les polluants amenés par les masses d’air se déposent sur les feuillages qui offrent à l’air une surface importante. Il peut donc y avoir, à ce moment pénétration directe de certains polluants par les stomates (ouvertures microscopiques par lesquelles respirent les feuilles) avec destruction des chloroplastes (réservoirs de chlorophylle).
  • Les pluies lessivent les feuilles (rôle bénéfique !) et entraînent les polluants vers le sol où leur acidité dissout et évacue les éléments majeurs dont se nourrissent les racines (magnésium, surtout) provoquant ainsi une carence identifiable dans certaines forêts.
  • Un excès d’acidité parvient à dissoudre l’aluminium du sol qui se révèle alors toxique pour les radicelles chargées de puiser dans le sol eau et nutriments.
  • Les arbres se sont affaiblis durant les périodes de sécheresse des années quatre-vingts ; ce déficit hydrique a d’ailleurs été amorcé violemment par la sécheresse de 1976. Que nous réservent dès lors les années à venir de ce début de 21e siècle ?
  • Suite à cet affaiblissement, les parasites commencent à attaquer les racines et accélèrent le déclin de l’arbre.
  • Les tempêtes de 1990 abattent des arbres qui montrent des signes évidents d’attaque des racines par des moisissures blanchâtres (cas de certains hêtres),
  • A toutes ces attaques se surimpose très probablement un effet de smog photochimique (v. ci-dessous) provoqué par l’action conjuguée du soleil, de certains hydrocarbures, naturels dans l’atmosphère des forêts, et des oxydes d’azote de la voiture automobile. Ce smog photochimique engendre de l’ozone, un gaz extrêmement toxique pour les plantes.

5Pour ce qui concerne l’Europe des 15, la pollution acide, attribuable pour 96 % à la production d’énergie, a connu une récession significative durant les vingt dernières années. Durant les seules années quatre-vingt-dix, la réduction des émissions de gaz acides a été de 40 %. Divers remèdes ont été adoptés pour atteindre ce résultat : désulfuration des fumées de stations de production d’électricité, passage à des combustibles moins chargés en soufre, par exemple, le gaz naturel et, enfin, pression exercée par le législateur qui impose une désulfuration plus poussée des combustibles dérivés du pétrole (source : Eurostat, 2001). Il s’agit là d’une action très positive qui témoigne de la capacité des pouvoirs publics d’infléchir l’impact d’une pollution. Ce sera sans doute beaucoup plus difficile lorsqu’il s’agira de franchir un pas supplémentaire pour aborder les problèmes posés par le secteur domestique et par le secteur des transports. Il faudra alors parvenir à réviser le comportement de l’ensemble des citoyens du continent !

3. L’ozone stratosphérique

6A partir de 1984, les savants qui étudient l’Antarctique et son atmosphère observent que, au début du printemps de l’hémisphère sud, c’est-à-dire durant le mois d’octobre, l’ozone stratosphérique subit une réduction de concentration au-dessus du continent austral. Cette diminution passagère, faible au début des années quatre-vingts, s’intensifie progressivement pour atteindre, à la fin de la décennie, une ampleur inquiétante. L’alarme est lancée et, en 1987, le protocole de Montréal ratifié par cent cinquante pays convient de mesures visant à réduire, sinon à supprimer, la fabrication des « Fréons » (des chloro-fluorocarbones ou CFC) rendus responsables de cette destruction. Que se passe-t-il donc dans cette stratosphère si délicate pour que des substances comme les fréons, chimiquement inertes, inodores, insolubles, non toxiques, appréciés à juste titre pour leur inertie, se voient impliqués dans un tel bouleversement ?

7L’ozone est une forme instable de l’oxygène, représentée par le symbole O3 signifiant par là que cette molécule est constituée par l’union de trois atomes d’oxygène, alors que la molécule d’oxygène présente dans l’air est diatomique (O2). L’ozone est instable, il abandonne facilement son atome surnuméraire qui se montre alors très réactif (très oxydant) :

O3 → O2 + O

8Cette réactivité est parfois mise à profit pour épurer l’air ambiant (ozoniseurs) ou pour désinfecter les eaux de distribution dans certaines stations d’épuration ou encore, pour des opérations de blanchiment dans l’industrie. Il remplit pratiquement le même rôle que l’eau de Javel (ou que le chlore). L’ozone est un gaz très toxique à forte concentration et il se forme dans le smog photochimique : à ce titre, il est un polluant de l’air troposphérique car il s’attaque aux muqueuses et aux plantes.

9En revanche, dans la stratosphère, l’ozone se révèle particulièrement utile, car il protège la biosphère des rayons ultraviolets du soleil. Il est formé par des réactions chimiques de haute énergie déclenchées par des rayons solaires de très courte longueur d’onde (UV lointains) qui arrivent à « casser » les molécules d’oxygène de l’air :

O2 + UV (lointain) → 2 O

10suite à quoi, chaque atome d’oxygène s’unit à une molécule d’oxygène pour donner l’ozone :

O + O2 → O3

11Si la vie a pu se développer sur la terre ferme, c’est bien grâce à cet ozone qui forme à une altitude de vingt à trente kilomètres, un véritable bouclier filtrant qui, à son tour, arrête les rayons UV de plus grande longueur d’onde (UV proche), également trop nocifs. Cet effet filtrant est représenté par :

O3 + UV (proche) → O2 + O

12L’ozone absorbe ainsi un rayonnement ultraviolet pour se décomposer en une molécule d’oxygène plus un atome d’oxygène. Le rayon UV disparaît dans l’opération : c’est un « grain » d’énergie qui est consommé pour casser la molécule de O3. L’atome d’oxygène formé dans cette réaction est très réactionnel et, bien vite, il s’unit à une autre molécule d’oxygène pour reformer de l’ozone suivant la réaction présentée ci-dessus. Ou bien alors, il va s’attaquer à une autre molécule d’ozone et ainsi disparaître :

O + O3 → 2 O2

3.1. La destruction naturelle de l’ozone

13Diverses substances naturellement présentes dans la stratosphère sont susceptibles de réagir avec l’ozone. L’atome de chlore est particulièrement actif en ce sens. Cet élément est amené dans la stratosphère par diffusion, depuis la surface de la terre, d’un gaz naturel, le chlorure de méthyle (CH3Cl) une molécule stable et très peu soluble dans l’eau, ce qui lui garantit une durée de vie très élevée dans la troposphère. Arrivé à haute altitude, le chlorure de méthyle, qui est normalement stable dans l’air, subit lui aussi l’attaque des rayons UV de grande énergie et se décompose pour libérer un atome de chlore (l’indice « ° » utilisé dans les équations symbolise un électron isolé, non apparié) :

CH3Cl + UV → CH3° + Cl°

14Cet atome réagit alors avec l’ozone suivant :

Cl° +O3 → ClO° + O2

15suite à quoi, se déroule encore :

ClO° + O3 → Cl° + 2 O2

16On constate ainsi qu’un seul atome de chlore suffit à détruire deux molécules d’ozone. Mais, après la deuxième réaction, on retrouve l’atome de chlore intact, prêt à reprendre le cycle de destruction. Chaque atome de chlore peut être recyclé de nombreuses fois en détruisant ainsi des milliers de molécules de O3. Cependant le chlore doit aussi pouvoir disparaître du circuit, sinon il arriverait à épuiser tout l’ozone stratosphérique. Effectivement, le chlore lui aussi réagit avec différents gaz pour former des espèces relativement stables. Soit, par exemple, avec du dioxyde d’azote (NO2 un polluant !) :

ClO + NO2 → ClONO2 (stable)

17Soit encore avec le méthane (CH4) :

Cl° + CH4 → CH3° + HCl (stable)

18Il existe donc en stratosphère un subtil équilibre (naturel) entre les taux de formation et de disparition de l’ozone, ce qui permet d’en conserver des concentrations relativement stables et de garantir le maintien d’un « bouclier » anti-UV satisfaisant. Malheureusement, la technologie a créé des molécules et en a produit de telles quantités que, une fois encore, une perturbation s’est développée qui menace l’équilibre de l’ozone stratosphérique.

3.2. Perturbation par excès de substances anthropiques : le N2O et les CFC

19L’oxyde de diazote ou oxyde nitreux (N2O : « gaz hilarant ») est produit par l’action de microorganismes du sol sur la matière organique : son émission est amplifiée par l’apport d’engrais azotés artificiels. Il s’agit d’un gaz très stable en troposphère puisque son temps de vie moyen dans l’air est de l’ordre de 150 ans. On ne connaît pas de réaction qui, en troposphère, soit capable de le détruire. Il a donc tout le loisir de migrer vers la stratosphère où l’action des rayons UV de courte longueur d’onde arrive à le décomposer :

N2O → N2 + O*

20O* symbolise ici un atome d’oxygène excité : cette espèce est naturellement présente en stratosphère, suite à l’action des rayons UV sur l’oxygène et l’ozone. Mais l’apport d’un excès de N2O ouvre de nouvelles voies de destruction :

N2O + O* → N2 + O2

N2O + O* → 2 NO

21Cette dernière réaction fait apparaître une molécule active, elle aussi, dans la disparition de l’ozone :

NO + O3 → NO2 + O2

22Les chlorofluorocarbones interviennent par excès de déversement dans l’air : leur longue durée de vie dans l’air leur permet de se répandre dans la stratosphère et d’y apporter une contribution majoritaire à la destruction de l’ozone en amplifiant les mécanismes d’action similaires à celui du CH3Cl.

3.3. Le "trou" d’ozone sur l’Antarctique

23Etant donné que la raréfaction de l’ozone s’aggrave d’année en année au-dessus de l’Antarctique durant les quelques premières semaines du printemps austral, une émotion bien légitime s’est emparée de l’opinion publique. Qu’un excès de rayons UV s’abatte sur un continent relativement désertique ne provoque de soucis que pour les espèces animales qui vivent sur ses rives. Mais si cette percée des UV devait s’étendre au reste du globe, on devrait s’attendre à bien des déboires pour la biosphère. En parallèle avec les mesures des concentrations en ozone, on a aussi observé, durant l’hiver austral, en absence d’ensoleillement, une réduction très importante des oxydes d’azote de la phase gazeuse en stratosphère au-dessus de l’Antarctique. Il faut dire que, à ce moment, les températures y sont tellement basses que la vapeur d’eau, pourtant bien rare à ces altitudes, arrive à se congeler et à former de minuscules cristaux de glace qui restent en suspension dans l’air. Cette condensation se réalise d’ailleurs avec divers gaz acides tel HCl. D’autre part, et c’est une particularité de cette atmosphère polaire, un gigantesque anticyclone s’installe sur le continent durant tout l’hiver bloquant ainsi les gaz stratosphériques pendant quelques mois, dans un immense et lent carrousel.

24L’hypothèse retenue est que, durant l’hiver, des réactions chimiques se déroulent à la surface des cristaux de glace, par exemple :

ClONO2 + H2O(glace) → ClOH + HNO3(glace)

ClONO2 + HCl(glace) → Cl2 + HNO3(glace)

25Ces deux réactions décomposent une molécule (ClONO2) qui avait assuré l’élimination de ClO (active sous ensoleillement et destructrice d’ozone) avec, simultanément, libération de ClOH et Cl2. Ces molécules se réactivent sous l’ensoleillement retrouvé du printemps. Sous le rayonnement solaire, tout le chlore (inactivé sous forme de ClONO2 durant l’été) est à nouveau injecté dans les cycles de destruction de l’ozone :

ClOH + UV → Cl° + OH

Cl2 +UV → 2 Cl°

26Ce déferlement subit d’atomes de chlore a vite fait de consommer une grande partie de l’ozone qui, pendant l’hiver, avait connu la trêve faute d’énergie solaire.

27Si ce phénomène de destruction paraît s’être emballé au cours des deux dernières décennies, c’est parce que la production mondiale de dérivés organiques du chlore (Fréons et autres CFC) est arrivée au point que la stratosphère contient actuellement plus de chlore d’origine artificielle que d’origine naturelle. Très sagement, les principaux producteur mondiaux de CFC ont décidé de s’en remettre à des produits de substitution « respectueux de la couche d’ozone » ... dont certains sont dangereusement inflammables (il peut s’agir, par exemple, du butane par ailleurs présent dans l’essence automobile). Malheureusement, les millions de tonnes de CFC produites durant les décennies antérieures sont encore et toujours présentes dans l’atmosphère et pour de nombreuses années encore. Ces gaz sont pratiquement indestructibles en troposphère : dès lors, ils ont tout le loisir de diffuser vers la stratosphère où les conditions physico-chimiques sont bien différentes : les UV de haute énergie qui sont capables de décomposer l’oxygène et l’ozone peuvent aussi attaquer les liaisons des molécules de CFC pour libérer le chlore qu’elles recèlent.

28Beaucoup d’états à économie fragile se sont engagés dans la construction et l’exploitation d’unités de production de CFC, moins coûteux que les hydro-halogénures de substitution : ces substances sont vitales pour ces pays car elles sont utilisées dans les systèmes de congélation des aliments. Ces pays devraient-ils abandonner ces moyens de production pour s’aligner sur les décisions adoptées dans le Protocole de Montréal en août 1987 ? Leur situation financière ne le leur permet certainement pas.

4. Le smog photochimique

29Le smog (contraction de « smoke + fog » : brouillard de fumée) est un mélange de brouillard et de polluants issus de fumées du charbon : pendant longtemps il a été une composante particulièrement oppressante de l’air londonien. Depuis les années soixante, ce smog dit « acide » parce que fortement chargé en dioxyde de soufre a pratiquement disparu de la métropole anglaise depuis que des combustibles plus propres ont succédé au charbon. Par contre, un autre type de brouillard agressif s’est peu à peu développé sur bon nombre de villes, au rythme du développement de la circulation automobile : il s’agit du « smog photochimique » qui n’a plus rien de commun avec le brouillard acide. Comme son nom l’indique, le smog photochimique apparaît lorsque certains polluants sont soumis à l’action du rayonnement solaire. Ces polluants ont pour origine l’échappement des gaz de la voiture automobile : il s’agit surtout des hydrocarbures imbrûlés et des oxydes d’azote. En fonctionnement normal, le moteur à allumage commandé émet surtout du monoxyde d’azote (NO), la seule forme qui puisse se former aux hautes températures atteintes dans la flamme du moteur. A l’échappement toutefois, lors de son mélange avec l’air, une faible fraction de ce monoxyde réagit avec l’oxygène de l’air pour donner du dioxyde :

2 NO + O2 → 2 NO2

30Le dioxyde est un gaz sensible à la lumière du soleil qui provoque sa décomposition :

NO2 → NO + O

31A l’instar de ce qui se passe en stratosphère, l’atome d’oxygène réagit alors très rapidement avec une molécule d’oxygène pour former de l’ozone :

O + O2 → O3

32Etant donné qu’il y a normalement peu de dioxyde d’azote dans l’air, les concentrations en ozone restent, elles aussi, très faibles. Il en va tout autrement lorsque intervient la deuxième composante de la pollution par l’échappement automobile, à savoir, les hydrocarbures ou, tout au moins, certains d’entre eux, reconnus très actifs dans le développement du smog. Ce sont des substances typiques d’une combustion incomplète des hydrocarbures : oléfines, aldéhydes, ... Les aldéhydes, par ailleurs irritants des muqueuses, sont caractérisés par un atome de carbone terminal uni à un atome d’oxygène et à un atome d’hydrogène (liaisons non symbolisées) :

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

33Ces aldéhydes sont également sensibles à la sensibles à la lumière du soleil qui les décompose suivant :

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

34Les fragments de molécule ainsi formés (des « radicaux ») sont très réactionnels, au même titre que l’atome d’oxygène et, comme lui, réagissent avec une molécule d’oxygène pour engendrer un radical peroxyde :

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

35Un tel radical ne survit pas très longtemps dans l’air et s’associe rapidement avec, par exemple, une molécule de monoxyde ou de dioxyde d’azote (NO ou NO2) :

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

36Ces nouvelles molécules sont très préoccupantes, parce que, en se décomposant, elles fournissent du dioxyde d’azote qui va permettre au rayonnement solaire de produire plus d’ozone :

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

37Elles sont d’autant plus préoccupantes qu’elles sont elles-mêmes très nocives. Il s’agit de molécules qu’on appelle nitrites (ou nitrates) de peroxyacyle que la langue anglaise désigne par l’acronyme PAN. Ces molécules, en association avec d’autres dans l’air, forment un brouillard toxique, suffocant parce qu’il agresse les muqueuses ; elles sont phytotoxiques et cancérogènes. Il faut aussi remarquer que les conifères et, d’ailleurs, bien d’autres plantes émettent dans l’air des hydrocarbures actifs du point de vue du smog photochimique (les terpènes, par exemple). En association avec les oxydes d’azote apportés par la voiture automobile et un ensoleillement suffisant, ces hydrocarbures peuvent engendrer, dans les sites forestiers, un smog préjudiciable à la santé des arbres. On considère que deux groupes de gaz constituent les précurseurs du smog photochimique : il s’agit des oxydes d’azote (NOx) et des composés organiques volatils autres que le méthane (COVnm). Le tableau V.2. ci dessous donne l’état des émissions en Europe, en 1990 et en 1998. On y remarquera tout de suite l’impact majoritaire de la production d’énergie dans les émissions de NOx. Si les émissions naturelles de COV sont du même ordre de grandeur que celles dues à la production d’énergie, il en va tout autrement pour les émissions de NOx. En Europe, malgré l’accroissement de la consommation d’énergie (9 %) et du trafic automobile, une réduction sensible de l’ordre de 20 % est observée pour les oxydes d’azote : elle résulte de l’effort consenti dans la mise au point de chaudières à faible taux d’émission de NOx (brûleurs à mélange rapide) ainsi que dans l’adaptation du pot catalytique au moteur à combustion interne. Tout n’est donc pas négatif en matière d’évolution des pollutions !

Tableau V.2. Emissions de NOx et de COVnm en Europe en 1990 et en 1998, par les secteurs énergétique et non énergétique (103 t). Source : Eurostat 2001

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

5. L’effet de serre

38Au cours de son existence, la terre a connu bien des avatars climatiques. La civilisation néolithique, créatrice de l’agriculture et dont nous sommes les héritiers directs, n’a pu prendre son essor qu’à partir du moment où les conditions climatiques ont permis le développement à grande échelle de la culture des céréales. Par contraste, des périodes de « mini-glaciation » se sont manifestées, en Europe, par de sévères baisses de rendements agricoles et un renchérissement du blé. On sait aujourd’hui qu’une variation de température moyenne de quelques degrés suffit à bouleverser profondément les conditions de vie sur terre. On redoute que la déstabilisation que subit l’atmosphère de la planète depuis plus d’un siècle n’exerce sur le climat une influence significative qui risque de provoquer bon nombre de crises dues, en particulier, aux bouleversements de la géographie agricole de la terre. La température de l’atmosphère terrestre est réglée par un ensemble d’interactions thermiques, mécaniques et chimiques dont nous commençons à peine à décrypter la complexité. Mais à la base de tous ces échanges, il y a évidemment le soleil, pourvoyeur d’énergie primaire, source quasiment unique de toute énergie, de toute vie sur terre.

5.1. Les mécanismes de l’effet de serre

39Le soleil échauffe la terre de ses rayons et l’amène à une température sous laquelle la vie est devenue possible. Le globe terrestre reçoit un flux permanent d’énergie solaire et devrait donc voir sa température croître indéfiniment s’il n’existait un mécanisme compensateur. En vertu d’une loi bien établie de la physique, si la terre présente une température absolue non nulle, elle doit à son tour émettre de l’énergie sous forme de rayonnements ; c’est le principe du « corps noir » qui dit que tout corps porté à une température (absolue) donnée, non nulle, rayonne une énergie proportionnelle à la quatrième puissance de cette température. Ainsi donc, la terre échauffée par le soleil, dissipe-t-elle à son tour, par rayonnement, une énergie strictement égale à l’énergie reçue, ce qui conditionne la stabilité de sa température. Cet équilibre est décrit par une équation simple :

  • 1 Cette équation prend la forme mathématique suivante :

Energie reçue du soleil par la terre = Energie réémise par la terre1

40Il est possible de dresser un bilan assez précis des flux d’énergie qui aboutissent à cet équilibre. Le graphique ci-dessous dresse un schéma simplifié de l’importation et de l’exportation d’énergie dont la terre est le siège. L’énergie du soleil est importée sous forme de lumière visible et d’infrarouge (proche) sous un flux de 1368 W/m2 à l’entrée de l’atmosphère. Ce qui correspond à une énergie phénoménale, nous l’avons déjà signalé : en effet, l’hémisphère éclairé de la terre reçoit un flux lumineux d’une puissance de 178 1015 W. Une partie de ce rayonnement (lumière visible et IR) est réfléchie directement vers l’espace et constitue ce que l’on appelle l’« albedo » de la terre. Le solde du rayonnement, soit 69 %, (122,8 1015 W) est absorbé par l’atmosphère et par le sol, ce qui a pour conséquence d’échauffer la terre et de maintenir sa température moyenne à 15°C, température qui détermine, à la fois l’intensité de la réémission de rayonnement vers l’espace (presque exactement 122,8 1015 W) et sa longueur d’onde (infrarouge lointain : autour de 10 µm). Cet équilibre entre l’influx et l’efflux d’énergie garantit la stabilité (relative) de la température de la terre. Mais, avant d’être réémise vers l’espace, cette énergie lumineuse se sera transformée à raison de 67 % en chaleur et en lumière ; à raison de 33 %, elle aura dynamisé le cycle de l’eau sur terre ; une fraction de 0,33 % aura développé les courants aériens et marins et, enfin, 0,11 % de cette puissance aura alimenté en énergie la synthèse cholophyllienne.

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

  • 2 Toute molécule gazeuse composée de plus de deux atomes intervient dans l’effet de serre. Mais seul (...)
  • 3 Cet effet a été suggéré et calculé en 1896 par Svante Arrhénius, un chimiste suédois qui basait se (...)

41Remarquons d’emblée la différence qualitative entre le rayonnement incident et le rayonnement réémis par la terre : les gaz atmosphériques sont relativement transparents à la lumière du soleil (longueur d’onde autour de 0,55 µm) qui parvient presque intacte à la surface du globe, mise à part la fraction réfléchie par les nuages et absorbée par les aérosols. En revanche, il en va tout autrement pour le rayonnement infrarouge lointain (longueur d’onde autour de 10 µm) émis par la terre. Pour ce rayonnement, certains gaz présents en traces dans l’air constituent une barrière qui absorbe partiellement les infrarouges2. L’atmosphère s’échauffe ainsi quelque peu pour se stabiliser à la température que nous lui connaissons, température supérieure de 33 degrés à celle qui règnerait sans la présence de ces gaz. Cet obstacle dressé par les gaz à l’état de traces devant les rayons IR a été comparé au vitrage d’une serre qui bloque la chaleur, retient les calories et permet d’atteindre, sous la verrière, des températures supérieures à celles qui règnent à l’extérieur3. Les quinze degrés centigrade de température moyenne à la surface du globe sont donc le résultat de l’échauffement direct par le soleil et de l’échauffement par effet de serre naturel : sans cet effet, la vie sur terre serait impossible ou, à tout le moins, serait-elle limitée à une étroite bande de part et d’autre de l’équateur.

5.2. Les gaz à effet de serre

  • 4 1 ppm correspond à 10-4 % en volume.

42Il faut insister sur le fait que l’effet de serre a toujours existé sur notre planète : il est donc bien plus qu’une hypothèse de travail. Le problème qui se pose actuellement est de déterminer dans quelle mesure les gaz à effet de serre (GES) déversés à l’excès dans l’atmosphère par le développement humain sont susceptibles d’amplifier (de « forcer ») cet effet et de perturber ainsi un équilibre qui garantit l’existence de la vie telle que nous la connaissons sur terre aujourd’hui. Voyons donc quels sont ces gaz et à quelle concentration on les retrouve dans l’air : les concentrations reportées dans le tableau ci-dessous sont exprimées en ppm (parts par million)4. La troisième colonne du tableau exprime la contribution estimée de ces gaz à l’accroissement (au forçage) de l’effet de serre par rapport à la situation qui prévalait avant la révolution industrielle.

Tableau V.3. Caractéristiques des principaux GES (tiré de Kandel : 2002)

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

43Quelques remarques s’imposent à la lecture de ce tableau :

  • un rappel tout d’abord : à l’exception de l’eau et de l’ozone, il s’agit de gaz inertes dont le temps de séjour dans l’air est, au minimum, d’une dizaine d’années (cas du méthane : CH4) ;
  • l’ozone (O3) est utile en stratosphère mais nuisible s’il est présent au niveau du sol ; le smog photochimique provoqué par la voiture automobile en accroît les teneurs moyennes dans l’air et seul un changement drastique dans le mode de transport individuel pourrait laisser espérer une réduction de ses concentrations ;
  • le dioxyde de carbone (CO2) : produit normal de toute combustion d’hydrocarbures est nécessaire aux plantes mais la consommation de combustibles fossiles est telle et la destruction de la forêt tropicale tellement rapide, qu’il croît dans l’air au rythme d’environ 1,5 ppm chaque année ;
  • le méthane (CH4) : molécule pour molécule, il est 20 fois plus actif que le dioxyde de carbone dans l’absorption de l’infrarouge. Il est le constituant majeur du gaz naturel mais il est aussi une émanation des sols, des marais, des rizières, des herbivores. Sa concentration augmente dans l’air, sans doute à cause de l’extension des rizières et de l’élevage bovin nécessaires à l’alimentation humaine ;
  • le monoxyde de diazote (N2O, par ailleurs destructeur de O3 stratosphérique !) est aussi en croissance : il provient surtout, nous l’avons dit, de réactions microbiologiques exercées sur les engrais azotés, qu’ils soient naturels ou artificiels ;
  • les fréons (CFC) qui menacent aussi la couche d’ozone sont des gaz artificiels, nouveaux venus dans l’atmosphère et donc de contribution récente à l’effet de serre ;
  • la vapeur d’eau contribue le plus (50 %) à l’effet de serre naturel ; par contre, dans la mesure où ses concentrations relatives ne devraient pas trop augmenter dans l’avenir, elle ne devrait pas participer significativement au forçage de l’effet de serre par comparaison avec l’effet induit par le CO2 et le méthane ;
  • en réalité, sur une puissance de flux lumineux de 1 368 W/m2 à la limite de l’atmosphère, l’effet de serre global se monte à 154 W/m2 avec les contributions de

H2O 90 W/m2,

CO2 32 W/m2,

Nuages 30 W/m2.

44Répétons que, à l’exception des fréons, tous les GES sont naturellement présents dans l’air et ont toujours contribué à l’effet de serre « naturel ». Ce qui inquiète, c’est l’intensification qui résulte de l’augmentation actuelle de la concentration de ces gaz dans l’air. Le méthane est très préoccupant (2 % de croissance annuelle), mais l’exemple le mieux documenté est celui du dioxyde de carbone : au rythme actuel de combustion du charbon et des dérivés du pétrole, il ne faudra pas plus d’une soixantaine d’années pour voir doubler sa concentration dans l’air. Il vaut la peine d’évaluer les parts de responsabilité prises par les diverses sources de ce gaz à l’échelle mondiale.

Tableau V.4. Emissions mondiales annuelles de carbone, sous forme de CO2, par secteurs ( %)

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

  • 5 L’équivalent CO2 d’un gaz à effet de serre (GES) est obtenu en multipliant la masse de ce gaz par (...)
  • 6 Un contre-exemple qui nous touche fort est celui de la Roumanie où le désarroi économique actuel s (...)

45Les pays industrialisés sont évidemment les grands responsables de cette perturbation planétaire comme le montre le tableau ci-après qui exprime les émissions en tonnes d’équivalents de CO2 (CO2, CH4 et N2O)56.

Tableau V.5. Emissions d’équivalents CO2 par habitant, pour différents pays (1995) (Hamilton, 1999)

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

  • 7 Source : EUROSTAT (2001).

46Note 77

47Une autre cause de l’accroissement du CO2 dans l’air est la déforestation intensive qui s’étend, surtout dans les régions tropicales. Outre le massacre irréversible d’espèces vivantes, la destruction de la forêt humide (qui constitue la plus grande réserve de matière vivante au monde) participe de manière significative au déversement de dioxyde de carbone dans l’air, parce que la disparition de la forêt, c’est le brûlage et le pourrissement d’une énorme quantité de matière organique et de l’humus qui la nourrissait.

5.3. Que sera l’avenir climatique de la terre ?

48Il est encore difficile de définir avec précision les changements climatiques qui pourraient survenir suite au forçage de l’effet de serre et ce, pour différentes raisons relatives à des interactions qui ne sont pas encore suffisamment bien définies, par exemple :

  • les aérosols qui renforcent la diffusion du rayonnement solaire vers l’espace et accroissent ainsi l’albédo de la terre ; mais s’ils augmentent effectivement l’albédo au-dessus des océans ils exercent, en revanche, une influence mineure au-dessus des surfaces enneigées et des déserts ;
  • par contraste, les suies absorbent le rayonnement solaire autant qu’elles le diffusent. Par l’absorption de rayonnement, elles échauffent l’atmosphère dans les couches où elles se trouvent mais réduisent d’autant le flux d’énergie qui devrait échauffer le sol ;
  • la vapeur d’eau exerce un effet de serre important : une augmentation de la température moyenne de la terre va donc augmenter la teneur en eau dans l’atmosphère mais, simultanément, il y aura augmentation de la couverture nuageuse qui accroît la réflexion de la lumière incidente du soleil (on parle là de rétroaction). Dans quelle mesure le forçage devrait-il l’emporter sur l’accroissement de l’albédo est un bilan malaisé à établir ;
  • les nuages absorbent les rayons IR pour les réémettre à une longueur d’onde qui dépend de leur température (loi de Wien). La réémission vers l’espace s’effectue par le sommet des nuages : si leur sommet est à haute altitude, la basse température qui y règne réduit le taux d’émission. On comprend ainsi que des nuages épais exercent un effet de serre très important mais il est actuellement difficile de prévoir ce que seront les nuages du futur ;
  • le dioxyde de soufre a une durée de vie dans l’air de quelques jours : il induit la formation d’aérosols de sulfate qui favorisent la condensation de la vapeur d’eau en nuages. Il en résulte que SO2 exerce un effet refroidissant net dans l’atmosphère : il se fait que sa concentration a tendance à diminuer actuellement.

49Les recherches actuelles en climatologie tentent de prévoir ce que pourraient être les conséquences d’un doublement de la teneur de l’air en CO2. Beaucoup de climatologues estiment qu’on peut s’attendre, d’ici à 2 100, à une augmentation moyenne de la température de la terre de l’ordre de 1 à 3,5°C. Cette augmentation sera inégalement ressentie suivant la latitude, l’équateur étant le moins affecté tandis que les hautes latitudes subiront une augmentation de l’ordre de 4 à 8 degrés. Les répercussions en seront accablantes parce que de telles variations de température pourraient induire de très importants changements dans le régime des pluies à la surface du globe et provoquer une extension des déserts. On assistera aussi, par un simple effet de dilatation thermique, à une montée de 15 à 95 cm de la surface des mers, prélude à un rehaussement plus important mais beaucoup plus tardif qui résultera de la fonte des glaciers continentaux. Avec 50 à 70 % de la population humaine concentrée dans des régions côtières, une montée de 50 cm des eaux marines exposerait 100 millions d’humains à une fréquence accrue d’inondations sévères. Des archipels, tel celui des Maldives, pourraient être submergés (IEA, 2003).

5.4. La fonte des glaciers

50La manifestation, à ce jour la plus évidente, d’un réchauffement climatique global se marque dans la réduction progressive de la superficie des glaciers. Les glaciers alpins et andins sont déjà sérieusement en retrait. Le glacier d’Argentière à Chamonix est probablement le cas le mieux documenté : une gravure datant de 1850 en montre les limites pratiquement à hauteur du village alors qu’il en est actuellement éloigné de plus d’un km. Que ce soit dans l’Himalaya, en Afrique, dans les Andes, au Groenland ou encore en Scandinavie, le constat reste identique : les glaciers continentaux régressent depuis une centaine d’années. On s’attend à la disparition de 30 à 50 % des glaciers de montagne d’ici à 2 100. A plus court terme encore, cette situation va exacerber le problème de l’alimentation en eau douce de dizaine de millions de personnes. Sans compter que, sur le plan touristique, bon nombre de stations de sports d’hiver risquent de voir leurs pistes disparaître.

  • 8 M. Sturm, D. Perovich, M. Serreze : “Meltdown in the North”, Scientific American, October 2003 pp. (...)

51Dans l’Arctique, les signes de réchauffement se manifestent partout : la superficie totale couverte par les glaces a diminué au rythme de 3 % par décade durant les trente dernières années. Leur épaisseur s’est réduite de manière encore plus inquiétante, jusque 40 % en certains endroits8. La régression des glaces océaniques, par effet de rétroaction (« feed back ») positive, risque d’entraîner bon nombre de répercussions désastreuses sur le climat de la planète. Outre la réflectivité élevée qu’elles exercent sur la lumière du soleil, les glaces polaires, grâce à l’énorme inertie thermique qu’elles développent, exercent un contrôle fondamental sur l’équilibre thermique de la planète. Ces glaces constituent ce que l’on pourrait appeler un « dépotoir » de l’excès d’énergie thermique générée dans les régions tropicales et transférée vers les pôles par les courants aériens et océaniques. Leur disparition va amplifier le déséquilibre de la machine thermique planétaire.

5.5. Effets sur la biosphère

  • 9 Les vitesses de migration de plantes sous contraintes climatiques vont de 0,04 à 2,0 km par an alo (...)
  • 10 Sol des régions froides gelé en permanence : gigantesque « surgélateur » qui préserve de la décomp (...)

52La santé de l’être humain ne sera pas à l’abri d’effets néfastes. Une augmentation de la température signifie un accroissement du risque de propagation de maladies infectieuses transmises par les insectes, telles la malaria, la fièvre jaune, la dengue, … Pour ce qui concerne la végétation, il faut savoir que le dioxyde de carbone est un activateur de la synthèse chlorophyllienne, surtout en association avec un accroissement de la température … à la condition que l’irrigation et la fertilisation suivent ! En revanche, les microorganismes qui sont à la base de la fertilité des sols vivent dans une ambiance déjà très riche en CO2 : ils resteront donc très peu sensibles à l’accroissement de concentration réalisé dans l’atmosphère. Par ailleurs, chaque espèce végétale possède une zone d’extension qui correspond aux latitudes sous lesquelles les conditions climatiques lui sont le plus favorables. Avec l’accroissement de température, les systèmes écologiques – en ce compris les zones de cultures céréalières – vont voir leur optimum climatique déplacé vers des latitudes supérieures (vers le nord dans l’hémisphère nord). Les régions de viticulture ne seront pas épargnées. Ce serait la ruine pour beaucoup de régions d’Europe dont les plus méridionales pourraient être menacées de désertification. Et, puisque l’on s’attend à un réchauffement plus intense sous les hautes latitudes, il est évident que les forêts boréales devraient subir le déplacement le plus important (avec un rythme différent pour les différentes espèces qui peuplent les forêts). Un accroissement de 1°C de la température moyenne de l’air devrait induire un déplacement des forêts vers les pôles de 150 km. Un accroissement de température de l’ordre de 3°C se déroulant sur une cinquantaine, voire une centaine d’années constituerait évidemment une déstabilisation bien trop rapide pour permettre aux forêts de s’adapter à ces nouvelles conditions9. Pour apprécier l’impact potentiel d’une telle perturbation, il faut savoir que les forêts sibériennes, par exemple, constituent actuellement un cinquième de la superficie forestière mondiale et qu’elles hébergent près de la moitié des conifères dans le monde. Pour une bonne partie de la Sibérie, le réchauffement va également affecter les tourbières installées sur du permagel10 (permafrost) et engendrer une décomposition accélérée de la matière organique qui y est séquestrée avec, comme conséquence, une libération accrue de CO2, mais également le dégagement des énormes quantités de méthane qui y sont emprisonnées. Il se développerait ainsi une rétroaction positive des plus inquiétantes.

5.6. Situation en Europe en ce qui concerne les émissions de GES

53La réduction des émissions de GES est une des mesures de prévention qui s’imposent dans la lutte contre le forçage climatique : elle sera extrêmement difficile à réaliser dans la mesure où la production d’énergie reste, et sans doute pour longtemps encore, majoritairement basée sur la combustion de ressources fossiles. Dans ces conditions, il est utopique d’espérer pouvoir réduire à bref délai les émissions de CO2, sinon par quelques palliatifs de faible portée tel le recours à des combustibles de rapport H/C plus élevé … des combustibles fluides dont le meilleur, rappelons-le reste le méthane contenu dans le gaz naturel. On est en droit de redouter que ces mesures ne soient largement oblitérées par le progrès prévisible de la consommation mondiale d’énergie. Au rythme actuel de la croissance, on aboutira à un épuisement accéléré des réserves de ces combustibles de grande valeur que sont le gaz naturel et les hydrocarbures liquides. Le tableau ci-dessous reprend les bilans relatifs aux trois principaux GES émis en 1990 et en 1998 dans l’Europe des 15 (CO2, CH4 et N2O). On y a considéré séparément les émissions liées à la production et à la consommation d’énergie, et les émissions liées à des sources non énergétiques (agriculture surtout).

54On constate immédiatement que le CO2 présente la contribution de loin la plus importante : c’est d’ailleurs vrai à l’échelle mondiale. On doit également remarquer que, durant la période considérée, les émissions de GES n’ont décru que de 0,5 % ! Le léger accroissement de la contribution de N2O est attribuable au fait qu’il est produit en faibles quantités par le pot catalytique de la voiture à allumage commandé qui s’est imposé progressivement durant la dernière décennie.

Tableau V.6. Contribution de la production et de la consommation dans le secteur de l’énergie en Europe entre 1990 et 1998 (en 106 tonnes d’équivalent de CO2). Source : EUROSTAT 2001

Quelles sont les conséquences de latmosphère ?

5.7. Le Protocole de Kyoto : un espoir ?

  • 11 La France bénéficie du statu quo étant donné que l’importance de son parc de centrales nucléaires (...)

55A Kyoto, l’Europe des Quinze s’est engagée, pour 2010, à diminuer de 8 % ses émissions de gaz à effet de serre par rapport à ses émissions de 1990. On prévoit que deux pays seulement respecteront leurs engagements : il s’agit de la Suède et de la Grande-Bretagne. Si aucune mesure draconienne n’est prise, les dépassements les plus graves seront le fait du Danemark (38 %), de l’Espagne (33 %), de l’Irlande (27 %) de l’Autriche (24 %) et de la Belgique (23 %)11. Les Etats-Unis ont rejeté le traité et la Russie refuse de se lancer dans l’aventure de crainte d’entraver une reprise économique encore trop timide. L’optimisme qui avait animé l’élaboration du Protocole de Kyoto se trouve manifestement battu en brèche par l’impuissance des états à réfréner la croissance de la consommation sous toutes ses formes. Les gouvernements n’ont que peu de moyens pour imposer les restrictions draconiennes suggérées par le Protocole c’est à dire, en pratique, juguler le gaspillage et restreindre la part de la croissance économique liée à la consommation d’énergie fossile. Les citoyens, en tout cas, ne semblent pas prêts à accepter une rétrogression de leur confort, de leur bien-être. Les délais sont trop courts. D’autre part, il est peu probable que les sources d’énergie renouvelables puissent assurer une relève significative avant plusieurs décennies.

6. Conclusions

56De tous les effets qui viennent d’être passés en revue, le changement climatique est certainement le plus préoccupant, dans la mesure où il paraît impossible, à l’heure actuelle, d’infléchir le rythme de production d’une énergie qui repose majoritairement sur l’emploi des combustibles fossiles. Les pays en voie d’industrialisation miseront encore longtemps sur leurs propres ressources fossiles, solution la moins coûteuse pour eux, à court terme. Les pays industrialisés rechigneront à aliéner leur puissance économique à une réduction drastique du gaspillage énergétique actuel. L’équilibre économique et stratégique est fort délicat et les mesures d’économies risquent d’être beaucoup trop déstabilisantes en un monde où trop de conflits latents rendent cette aventure fort risquée.

57Et pourtant, les enjeux climatiques sont d’une telle ampleur que la prudence est de rigueur et qu’il faut absolument arriver à infléchir une situation qui risque de nous entraîner beaucoup trop loin dans l’altération de notre milieu de vie. Une possibilité de remédier à cet état de chose est, dans un premier temps, de faire appel à de coûteuses techniques d’épuration des combustibles, des fumées, et de mettre au point des opérations de séquestration du CO2 (nous en avons parlé au chapitre III). Il faudra aussi s’orienter vers d’autres techniques de production de l’énergie qui n’utiliseraient pas les combustibles chimiques fossiles que nous brûlons aujourd’hui. En ce sens, les énergies renouvelables ont un rôle important à jouer. Nous en soulignerons les sévères limitations : intermittence et dispersion.

58L’énergie nucléaire, actuellement très controversée, doit continuer à alimenter notre monde. Il n’est absolument pas réaliste de la reléguer aux oubliettes. Elle doit entrer en ligne de compte dans les bilans énergétiques qui entretiennent les débats en matière d’environnement. Cet aspect du problème va être abordé dans le chapitre suivant.

7. La prise de conscience internationale

59Juin 1972 : la Conférence mondiale de l’environnement de Stockholm produit une déclaration qui vise à protéger l’environnement pour les générations futures.

60Juin 1983 : conférence de l’ONU pour assurer le suivi de la déclaration de Stockholm.

611984 : création par l’ONU de la Commission mondiale de l’environnement et du développement avec, à sa tête, Gro Brundtland.

62Août 1987 : Protocole de Montréal pour la protection de l’ozone stratosphérique.

63Juin 1992 : Sommet de la Terre à Rio de Janeiro.

64Juin 1994 : à Paris, Convention de lutte contre la désertification.

65Décembre 1997 : Conférence de Kyoto sur le changement climatique : Protocole sur la réduction des gaz à effet de serre. Effort demandé : Europe : 8 %, USA : 7 %, Japon : 6 %, Canada : 6 %, Russie : 0 %.

662000 : Protocole de Carthagène sur la prévention des risques technologiques

67Août 2002 : Sommet de la terre à Johannesburg.

8. Ouvrages consultés

68Bliefert, C. et Perraud, R. (2001) : « Chimie de l’Environnement – Air, Eau, Sols, Déchets » ; De Boeck Université, Paris-Bruxelles.

69Eurostat (2001) : “Integration – indicators of energy”, Data 1985-1998 : Office for official publications of the European Communities, Luxembourg.

70O’Neill, P. (1993) : “Environmental Chemistry” ; Chapman & Hall, 2d edition.

71Seinfeld, J.H. (1975) : "Air pollution : physical and chemical fundamentals", McGraw-Hill.

Le forçage de l’effet de serre

72« Atmosphère, Atmosphères », N° hors série de Science et Vie ; mars 1991.

73Berger, A. (1992) : « Le climat de la terre -Un passé pour quel avenir ? » : De Boeck Université, Bruxelles.

74Berger, A. : « Modélisation de l’accroissement futur des gaz à effet de serre », in « Les changements climatiques » : séminaire scientifique organisé par le Secrétaire d’Etat à l’Environnement, Bruxelles, juin 1989.

75Broecker,W.S. & Denton, G.H. : "What drives Glacial Cycles ?", Scientific American, January 1990, pp. 43-50.

76GIEC : Groupe Intergouvernemental sur l’Evolution des Climats ; Rapport de la Seconde Conférence sur le Climat, nov. 1990, Genève.

77Hamilton, C. (1999) : “Greenhouse gas emission per capita” : annex B ; Parties to the Kyoto Protocol. Australia Institute, submission n° 1 : Australia Institute for a Just, Sustainable, Pacefull Future.

78IEA – International Energy Agency (2003) : Greenhouse Gas R & D Programme.

79Jones, Ph.D. & T.M.L. Wigley : "Global warming Trends", Scientific American, August 1990, pp. 66-73.

80Kandel, R. (2002) : « Le réchauffement climatique » ; Que sais-je ?

81Lavallard, J.-L. : « Grave menace sur le climat de la terre », Science et Avenir, Septembre 1988, pp. 56-68.

82Saugier, B. : « L’agriculture menacée par l’effet de serre ? », Supplément La Recherche, n° 227, décembre 1990, pp. 42-45.

83Science et Vie, dossier spécial : « La Menace Climatique », décembre 2003, pp. 46-117.

L’ozone stratosphérique

84Aimedieu, P. : « La querelle de l’ozone », La Recherche, vol 19, n° 196, février 1988, pp. 272-282.

85Alloway, B.J. and Ayres, D.C. (1993) : “Chemical Principles of Environmental Pollution” : Blackie Academic & Professional.

86Heichlen, J. (1976) : "Atmospheric chemistry", Academic Press, 406 p.

87MacKerron, C.B. : "Chemical firms search for ozone-saving compounds", Chemical Engineering, January 18, 1988, pp. 22-25.

88Stevenson, R. : "CFCs-alternatives on the starting blocks", Chemistry in Britain, July 1988, pp. 629-630.

89Stolarski, R.S. : "The Antarctic ozone hole", Scientific American, Jan. 1988, p. 20.

90White, R.M. : "The great climate debate", Scientific American, July 1990, p. 18.

Les forêts

91CEC : Commission of the European Communities, Directorate General for Science, Research and Development : Environmental Research Programme : “Monitoring air pollution and forest ecosystem research”, edited by A.H.M. Bresser and P. Mathy, report n° 21, 1990, 270 p.

92Smith, W.H. (1990) : “Air pollution and forests : interaction between air contaminants and forest ecosystems”, Springer-Verlag, 618 p.

Quelles sont les causes et les conséquences de la pollution atmosphérique ?

La pollution de l'air peut notamment causer des problèmes cardiovasculaires, des allergies, des crises d'asthme, des conjonctivites, des maladies des bronches, des cancers du poumon ou de la peau, des problèmes de vision, des maladies du sang, des problèmes dans le développement mental de l'enfant, entre autres.

Quelles sont les causes de l'atmosphère ?

Les causes de la pollution de l'air.
Les polluants primaires. Qui proviennent de sources d'émission variables, avec notamment : ... .
Les polluants secondaires. ... .
La combustion de ressources fossiles. ... .
Les activités agricoles. ... .
L'après-vie des déchets. ... .
L'activité industrielle. ... .
Les exploitations minières. ... .
La pollution intérieure..

Quelles sont les causes de la pollution de l'atmosphère ?

Les principales sources de pollution de l'air sont les transports, la production d'électricité, les émissions industrielles et agricoles, le chauffage résidentiel et la cuisine. Certains polluants atmosphériques ont aussi des sources naturelles.

Quelles sont les conséquences de la pollution ?

Une dégradation de la fonction ventilatoire : baisse de la capacité respiratoire, excès de toux ou de crises d'asthme. Une hypersécrétion bronchique. Une augmentation des irritations oculaires. Une augmentation de la morbidité cardio-vasculaire (particules fines).